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Traversée du désert à dos de serpent

Traversée du désert à dos de serpent

Arrivé au carrefour au milieu du désert
À droite du troisième palmier
S’élève le minaret blanc démesuré
Et de là, monte la prière.

Aveuglé par le soleil,
Assoiffé comme un oasis asséché,
Mes pieds quasi brûlés me portent
Aux portes de la vieille ville.

La grande porte en bois est fermée
Et je toque pour essayer d’entrer.
Pas de réponse, pas de bruit.
Je longe le rempart, voir ce qui suit,

Ce qui se cache derrière ces murs.
Des murs de carton-pâte,
Un décor de cinéma abandonné à la hâte
Et derrière le désert reprend ses droits, sans fioriture.

Je reste planté là.
Et comme moi, le soleil ne bouge pas.
Au zénith, pile à la verticale de ce décombre,
Il me refuse son ombre.

La prière aussi a disparu.
Je ne l’entends plus.
Et les miennes volètent au gré du vent,
Mais tout autour de moi que du sable blanc.

Je crois que je vais pleurer,
Je me mets à creuser.
Au pire ce sera ma tombe,
Au mieux de l’eau en sortira en trombe.

Mais la réalité est entre les deux
Et après avoir vainement enfoncé mes doigts dans le sable
Toujours point de Dieu
À la place un serpent énorme,
S’approche de moi.

Il doit faire plus d’un mètre de diamètre
Il n’a pas l’air venimeux ni haineux,
C’est plutôt un sage radieux.
Il me lance un ou deux sss
Puis m’invite à le suivre.
Je monte à califourchon sur son dos
Et admire ses écailles blanches et marrons.

Je réalise que je ne suis plus assoiffé ni affamé,
Ma fatigue s’est estompée
Et un sentiment d’apaisement tente en moi de s’immiscer.

Le voyage se passe en silence,
Mon serpent surfe les dunes
Et ne s’arrête que pour la nuit.
Il se roule en spirale et je dors au milieu de lui.

Après des jours, des semaines voire des mois,
À serpenter le désert,
Petit à petit la végétation est réapparue.
Le jaune a commencé à se teinter de vert.

Le serpent s’arrête et j’en descends.
Alors qu’il passe à côté de moi,
Je laisse glisser ma main sur ses écailles
Il devait bien faire huit mètres de long.

Mes pieds ne me brûlent plus,
Je suis allongé sur un lit.
Tout est blanc.
Par la fenêtre, au loin je vois le minaret blanc démesuré.

De là-bas monte la prière.
On frappe à ma porte, en douceur.
Entre une infirmière, petite :
« Vous avez de la visite »

Il s’agit de mon sauveur.
Il m’avait ramassé inanimé devant les portes de la vieille ville
Puis transporté à l’abri, loin de la chaleur.
Il me sourit et me parle en langage des signes,
Je m’illumine, intarissable de remerciements
Et lui raconte ma traversée du désert à dos de serpent.
 

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